Snakes everywhere | Tom

Barty s'ennuyait.

Il fallait dire que cette vie n'était pas folichonne, entre faire le ménage dans cet appartement de luxe et donner à manger au chat, sans oublier arroser les plantes, on était loin de son ancienne vie de débauche.

Sans Evan, sans doute aurait-il replongé dans cette vie de débauche et de fureur. Sans doute n'aurait-il pas opté pour une prétendue oisiveté où il retrouvait tous les soirs son amant dans leur lit commun.

Ou n'achetait-il pas régulièrement les magazines dans lesquels il était photographié pour les entreposer dans les toilettes (et faire des choses qui étaient plus ou moins inavouables, mise à part que les deux garçons avaient toujours été très crus entre eux et nul doute qu'Evan Rosier savait ce qu'on faisait de ces magazines.

La vie semblait avoir repris son cours, mais Barty s'ennuyait profondément.

Il était bien sûr plus d'une fois descendu dans la rue chercher des moldus un peu alcoolisé et leur avait défoncé la gueule ; c'était le cas de cet après-midi, il s'était éloigné de quelques pâtés de maison,  à une distance suffisamment raisonnable pour que nul ne puisse le soupçonner, loin des caméras de surveillance moldu et avait suivi ce petit homme qui avait interpelé une femme à la sortie du métro.

Barty ne savait même pas s'il l'avait tué ou juste à moitié amoché. L'homme respirait avec peine alors qu'il l'avait traîné derrière un sac poubelle et qu'il lui avait lancé le maléfice d'Oubliettes. Il y avait également eu un Imperius bien mesuré un peu avant pour lui faire prendre un ou deux verre d'alcool en plus et se gausser devant ses mimiques en panique.

À un moment, Barty Croupton Junior s'était lassé.

Il s'était dit qu'Evan l'attendait peut-être à l'appartement, qu'il avait sûrement autre chose à faire et regarder ce moldu impuissant souffrir ne l'intéressait plus.

Barty avait donc fini par le laisser tomber, puis s'était glissé parmi le flux humain qui composait le centre-ville londonien pour rentrer chez lui, empruntant maintes rues annexes pour brouiller les pistes des policiers moldus.

Il finit donc par atterrir dans le hall d'entrée de son immeuble, se frotta les mains sur un mouchoir qui rougit instantanément puis sifflota naturellement en ouvrant la boîte aux lettres. Rien. Barty s'étira, fit craquer quelques os.

Quelle belle journée.

Il y avait quelque chose de l'ambiance qui avait changé.

Irrésistiblement, sensiblement.

La clé de la boîte aux lettres était restée dans la serrure et la main de Barty s'était arrêtée sur son chemin, comme s'il y avait une présence qui l'empêchait d'accomplir le mouvement en entier.

Que son souffle s'était en partie arrêté également, qu'il avait eu du mal à respirer de nouveau calmement avant de se retourner (au prix d'un effort considérable) vers l'homme qui venait d'entrer dans le hall.

Savait-il, en vérité ?

Savait-il avant qu'il lui dise ?

Avait-il senti cet homme le suivre tout au long de sa journée, alors qu'il était avec les moldus ou même qu'il s'était arrêté trente longues secondes devant cette immense affiche où on voyait Evan s'étirer ? Au nom de Voldemort, le mangemort se mit aussitôt à genou et baissa la tête. Il tenta de faire le vide dans son esprit, malgré les milliards de pensées qui filaient à la minute, toutes menées par la peur. Cette peur fugace et vive de perdre ses amis.

Il y avait dans son bras comme cette sensation insupportable de brûlure.

Il n'avait pas rencontré le Lord depuis si longtemps, et cette version semblait bien plus jeune – mais cela ne voulait pas dire qu'il devait pour autant la sous-estimer, rien que sa présence lui donnait des frissons, il pensa à Regulus, brièvement, se dit que toutes leurs belles paroles n'étaient rien que folie.

« Maître. », dit-il à voix basse. Il l'avait appelé par le nom de son père, mais Barty n'y avait quasiment pas fait attention. La peur et la soumission étaient bien trop importantes.

Il pensa un moment l'inviter à monter mais cette pensée fut immédiatement contrée par l'éventuelle présence d'Evan en ces lieux. Et si ce dernier était rentré plus tôt ? Et s'il l'attendait, ravi de le voir ? Et s'il recommençait avec lui ses exactions envers les moldus et finissait assassiné de la main d'un Auror ?

Barty ne voulait en aucun cas que ce sort soit le sien, voilà pourquoi il ne proposa pas au Maître de monter, ni ne l'invita.

« Je suis heureux de vous retrouver, je ne doutais pas de votre présence ici. Puisque vous m'avez cherché, vous devez avoir un plan pour ce monde. Je serai heureux de l'écouter, vous m'avez tellement manqué. »